
Avec Pianoid, Edouard Ferletrevient là où on ne l’attend pas avec un album qui s’aventure aux confins de l’electro, de la musique contemporaine et de l’ambiant. Si Bach a souvent été le terrain de jeu favori du pianiste, celui-ci franchit d’un pas de géant les siècles pour se placer aujourd’hui sous les auspices de Philip Glass ou Brian Eno. Avec la complicité du réalisateur sonore Joachim Olaya, en charge du dispositif interactif et électroacoustique, Edouard Ferlet nous embarque dans un voyage musical technologique. Une exploration de l’instrument orchestre par excellence où il délivre des paysages sonores à la matière riche, onirique et profondément originale.
Si ce projet est en apparence un dialogue d’Edouard Ferlet avec lui-même, il est aussi et surtout un échange entre un homme et une machine. En s’emparant du diskclavier, système de piano automatisé et mécanique développé autour du langage MIDI, le musicien joue avec son double virtuel. Il y a ainsi deux pianos. L’un est entre les mains d’Edouard, l’autre est une machine. Elle est son reflet, sa créature mécanique. Cet autre Edouard est précis, rigoureux, formel mais aussi déviant et intempestif. Il est, par moment, un parfait accompagnateur mais à d’autres endroits revendique son indépendance et son autonomie pour dominer les échanges par sa virtuosité.Cet outil permet, en effet, de reproduire un jeu sur l’instrument humainement impossible à interpréter : une quantité de notes jouables en simultané, une précision rythmique et des vélocités extrahumaines. L’Homme, dont le jeu est augmenté et démultiplié, fait face à la Machine, parfois soumise ou intelligente, toujours surprenante. La technologie est ici au service de la poésie sonore.Loin d’un simple exercice de style, Pianoïd nous questionne sur la place de l’interprète et de l’improvisation. Il donne une vision futuriste de ce que peut être un « solo depiano » dont le langage musical est augmenté par un être virtuel.